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Président de Lacroix Groupe Conseil à Montréal, une firme qui offre des services de consultation stratégique en gouvernance, l’auteur était jusqu'à tout récemment, Vice-président investissements au Fonds de Solidarité FTQ et Vice-président du chapitre québécois de l’IAS. **** Les chroniques qui apparaissent dans ce blog sont rédigées puis publiées dans le bulletin mensuel de l'Association des MBA du Québec. À noter qu'elles ne reflètent que l'opinion de l’auteur **** Vous pouvez également obtenir plus d'infos sur certains des services en gouvernance que Lacroix Groupe Conseil est en mesure de vous offrir en allant voir le site web à : http://www.lacroixconseil.com

dimanche 30 avril 2006

T’es qui toi ?

Bien installé dans une tour au centre ville de Montréal, vous participez à un conseil d’administration d’une entreprise publique. Avec vos collègues administrateurs et à la lueur des plus récentes données financières, vous en venez à la conclusion que l’usine de « Quelque-Part-les-Machins » (située loin dans le Québec profond) est rentable mais pas assez profitable.

On ferme
Déjà vous avez tenté (subtilement…) de la vendre à d’autres joueurs de l’industrie, mais pour diverses raisons, personne ne s’est montré intéressé. Pour plaire aux analystes qui suivent le titre et maintenir le niveau de rendement auquel vos actionnaires sont habitués, la décision est prise de fermer l’usine et de transférer la production dans un bâtiment mitoyen à l’usine principale, évidemment située dans la région métropolitaine.

Dans les jours qui suivent l’annonce, une levée de boucliers s’effectue dans la région concernée et toutes sortes d’intervenants (dont vous ignoriez jusque-là l’existence) se manifestent pour vous infléchir et changer votre décision.

Détenteurs d’intérêts ou d’actions ?
Bienvenue dans le monde des détenteurs d’intérêts (communément appelés « stakeholders ») qui, ironiquement, ne sont généralement pas des détenteurs d’actions (« shareholders »). Au fil des ans, outre les groupes politiques, les syndicats et les élus municipaux concernés, toute une panoplie de groupes de pression a émergé au Québec :

  • Chambres de Commerce (locales, régionales,…);
  • SOLIDE, CLD, SDE, DEC et autres organismes de plus de 3 lettres visant le développement régional;
  • Coalitions et regroupements d’actionnaires (Lamoureux ou Michaud);
  • Groupes de pression environnementaux;
  • Regroupements de travailleurs risquant de perdre leur emploi (direct ou indirect);

Mais à titre d’administrateur, à qui êtes vous redevable de vos gestes ? Ici, la plupart vous répondront : « Envers l’organisation et l’ensemble de ses actionnaires ».

Mais des activistes tentent d’élargir la notion pour y inclure un certain niveau de responsabilité morale envers ceux qui sont touchés par les décisions du CA et ses impacts au niveau de l’entreprise.

Ailleurs, c’est plus complexe. Des études réalisées il y a quelques années en Asie et en Europe sur la question montraient que la perception était beaucoup moins claire, avec une prépondérance pour les droits des travailleurs et de la population environnante avant ceux des actionnaires. Qu’en est-il aujourd’hui ? À voir les décisions de rationalisation prises partout dans le monde, je serais porté à croire que le phénomène de la globalisation est en train de s’étendre à ce concept également…

Pas la morale
Si vous êtes seul actionnaire, il vous est permis de faire intervenir vos valeurs personnelles et votre morale dans vos décisions d’affaires. Ainsi, j’ai souvenir d’un entrepreneur Beauceron qui avait renoncé à vendre son entreprise à gros prix après avoir appris que les activités seraient transférées aux Etats-Unis, avec pour conséquence de massives pertes d’emplois pour ses employés.

Mais selon moi, si valeurs d’éthiques et respect des détenteurs d’intérêts sont acceptables, la morale n’a pas de sa place au CA d’une entreprise publique, dont la mission est d’optimiser le rendement des actionnairesmais.

Les décisions doivent donc être prises dans le sens des intérêts des actionnaires (mesures gérées comme un risque à l’image), à défaut de quoi, un administrateur risque de se retrouver en défaut de ses obligations de fiduciaire.

Maintenant, liez mes propos avec la réalité d’une Société d’État (ex : Hydro ou Loto-Québec), dont le seul actionnaire est le gouvernement, et là, tout devient vraiment confus.

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#21 - Bulletin AMBAQ d'Avril 2006