Les instances du PLQ, de l’ADQ et du PCC, avec Jean Charest, Mario Dumont, et Brian Mulroney (et du PQ[1] avec André Boisclair) ont tour à tour jugé nécessaire de verser des sommes qui s’additionnaient aux avantages normalement conférés au poste, pour permettre à leur chef respectif d’avoir une rémunération commensurable à leur stature. L’avenir nous apprendra si d’autres cas seront révélés, mais est-ce normal ?
Comme le thème du mois porte sur les médias, je ferai un lien entre cette question et un sujet chaud en gouvernance, soit la divulgation et l’établissement de la rémunération des administrateurs. Vous serez étonnés de constater qu’à cet égard, il existe beaucoup de similitudes entre l’enjeu lié au poste d’administrateur et de politicien.
De la rémunération
Comment arrive t-on à justifier qu’un sous-ministre gagne plus que le Premier ? Que le patron du PDG (le président du conseil) gagne 5% du salaire de celui-ci ? Pourquoi a-t-on si peur de payer la vraie valeur d’un poste ?
- Beaucoup pensent que ces postes sont déjà très bien rémunérés et peu de voix s’élèvent pour affirmer le contraire ;
- Certains contestent la valeur de la contribution de ces individus et leur capacité à vraiment aider à changer les choses pour le mieux ;
- Même si les risques et les responsabilités se sont accrus, il ne manque pas de candidats (quoi que +/- expérimentés…) désireux d’accepter les postes disponibles ;
- Si on augmentait la rémunération des dits postes, il y aurait encore plus de volontaires désireux d’avoir la « job ». Mais certaines personnes médisantes prétendront que ceux qui seront attirés par cette rétribution améliorée ne seraient pas nécessairement ceux que l’on chercherait à recruter.
Il y a probablement beaucoup de cynisme lié à cette analyse. Pour ma part, je continue de croire que l’on doit offrir aux administrateurs et aux politiciens, une rémunération raisonnable eue égard aux risques assumés et aux responsabilités associées à la fonction. Ceci, malgré le fait que certains se portent volontaires pour agir bénévolement (mon vieux mantra de « Pay peanuts, Get monkeys »). Le fait de payer conférant aux actionnaires (et électeurs) le droit d’exiger d’eux un certain niveau de performance.
De la divulgation
Vous vous rappelerez sans doute les combats épiques que certains activistes ont mené aux assemblées d’actionnaires. Celles-ci ont éventuellement mené à l’obligation pour les sociétés ouvertes de divulguer de l’information quant à la nature et l’ampleur de la rémunération des hauts dirigeants et maintenant des administrateurs. Les CA plaidaient alors (tout comme on l’a entendu récemment pour les politiciens) que :
- Ils n’étaient pas tenus de le déclarer ;
- Il s’agissait d’information de nature privée et personnelle ;
- La méthode de calcul était de nature confidentielle et stratégique.
Mais on ne peut empêcher ni les sociétés ni les partis de choisir de rétribuer ceux qui les dirigent, après tout, c’est leur argent, ils ont le droit d’en disposer comme bon leur semble.
Après plusieurs années de divulgation, on s’est rendu compte qu’il est non seulement important d’être transparent quant au combien et au qui, mais qu’il faut également porter attention à la rémunération globale (salaire, bonis, options, retraite, …). On a aussi compris qu’il faut divulguer les méthodes d’élaboration des volets de rémunération incitative pour s’assurer d’un enlignement d’intérêt avec les actionnaires et d’un focus sur la création de valeur.
Mon seul bémol étant que je crois que la divulgation a initialement mené à une course entre les meilleurs joueurs (un peu comme dans le sport professionnel) qui a contribué à créer une spirale inflationiste.
De la transparence
Nos politiciens ont appris à la dure que ce que l’on cache finit souvent par se savoir et qu’alors, il en faut très peu pour que tout devienne enrobé d’une certaine odeur de scandale. Surtout que cette dernière est extrêmement difficile à dissiper à posteriori. Une politique prônant la transparence avec ses partenaires est généralement gagnante.
Comme société, nous devrions accepter qu’il est préférable que ceux qui représentent nos intérêts soient suffisamment payés pour leur contribution, de façon à éviter qu’ils tentent par toute sorte de moyen détournés de faire en sorte d’atteindre leurs objectifs. Et comme ils seront payés adéquatement, nous serons en mesure d’exiger d’eux une gestion à la fois efficace et efficiente et d’un certain niveau.
[1] Pour le PQ, leur chef n’occupait pas de siège électif et conséquemment, n’avait pas de salaire à titre de député et l’arrangement avait été divulgué.
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#34 - Bulletin AMBAQ de Mai 2008