Qui suis-je ?

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Président de Lacroix Groupe Conseil à Montréal, une firme qui offre des services de consultation stratégique en gouvernance, l’auteur était jusqu'à tout récemment, Vice-président investissements au Fonds de Solidarité FTQ et Vice-président du chapitre québécois de l’IAS. **** Les chroniques qui apparaissent dans ce blog sont rédigées puis publiées dans le bulletin mensuel de l'Association des MBA du Québec. À noter qu'elles ne reflètent que l'opinion de l’auteur **** Vous pouvez également obtenir plus d'infos sur certains des services en gouvernance que Lacroix Groupe Conseil est en mesure de vous offrir en allant voir le site web à : http://www.lacroixconseil.com

mercredi 20 octobre 2010

NUCLÉAIRE VERSUS GOUVERNANCE

Pour aller avec le dernier numéro du bulletin de l'AMBAQ qui porte sur le nucléaire (probablement qu’il se veut explosif), je me suis dit qu’il serait amusant de faire une analyse comparative, légère et absolument non scientifique de cette industrie avec celle de la gouvernance.

Des similitudes

Dans les deux cas :

• Il y a une certaine vogue pour mettre en route de nouvelles centrales nucléaires ainsi que de mettre sur pied plusieurs nouveaux CA
• Ils jonglent avec le concept "très actuel" de responsabilité sociale
• Leurs opérations vous amènent au cœur de la chose
• Leur fonctionnement est méconnu du grand public et cette méconnaissance rend leurs processus épeurant
• Ils requièrent des tableaux de bord sophistiqués, mais lorsque mal gérés, les décisions prises peuvent s’avérer dangereuses et avoir des conséquences néfastes
• Notre gouvernement fédéral n’a ménagé ni le PDG de « Droits et Démocraties » ni celle de la « Commission canadienne de sécurité nucléaire ». On semble y manquer aussi fréquemment de bonne gouvernance, que d’isotopes radioactifs…
• La plupart du temps on porte un « suit » sur la job
• Il est difficile de vendre l’adhésion au concept au grand public qui demeure sceptique

Des différences

• La popularité de la gouvernance semble être à la hausse, tandis que celle des armes nucléaires est en forte baisse
• Seul le nucléaire est supposé être dangereux pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique, bien que…
• On ne porte pas de détecteurs de radiation lors d’un CA
• Il y a rarement de démonstration dans la rue pour protester contre la mise sur pied d’un CA ou de campagne contre la bonne gouvernance
• Si on s’entend pour dire que la bonne gouvernance à toujours sa place, il en va autrement de l’énergie nucléaire

Les essentiels

Si vous siégez sur un conseil qui a un lien, même menu, avec le nucléaire, il y a certains volets de la gestion des risques sur lesquels vous devriez porter une attention particulière, notamment :

• L’opinion publique (envers la marque) et son impact sur la capacité de l’entreprise à se développer et demeurer pérenne
• Mettez en évidence vos efforts portant sur les volets éthique et contrôle
• Tout le volet SST et particulièrement celui lié à l’intégrité physique de vos employés et partenaires d’affaires
• La gestion des déchets et autres résidus issus de vos opérations
• Les éléments inattendus si votre entreprise opère dans des pays où l’on retrouve corruption, extrémisme ou des situations de guerre (réelles ou appréhendées)

Et si vous avez d’autres éléments à suggérer, n’hésitez pas d’aller les inscrire à la suite de la chronique sur ce blogue, mais soyez pas trop sérieux…

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#49 - Bulletin AMBAQ de Novembre 2010

mercredi 8 septembre 2010

LES “RUSTRES” ET LES RUSSES

Notre fierté nationale (RIM)

Alors que les usagers de BlackBerry de par le monde craignent la perte de leur précieux signal, ici, on a parfois l’impression d’en avoir trop.

Qui d’entre nous n’a pas été confronté à un interlocuteur qui semblait tout à coup absent de la conversation afin de porter son regard sur son BB (ou autre appareil dit « intelligent »). Moi… jamais je ne ferais ça !

Sur l’usage du BlackBerry

Évidemment que cela peut paraître impoli si cela survient au resto avec une connaissance intime, mais qu’en est-il lorsque quelqu’un vous ignore de cette façon durant une réunion d’équipe, une présentation à des clients, où encore, un des sujets de la présente chronique, lors d’un conseil d’administration ? Le geste revêt alors une signification beaucoup plus importante :

• Suis-je à ce point inintéressant ?
• Est-il fermé à mes idées ou bien sont-elles mauvaises ?
• A-t-il d’autres préoccupations plus importantes que ce qui est sur la table (pourtant important pour moi et l’organisation) ? Et surtout,
• Est-ce qu’il prend son rôle d’administrateur au sérieux ?

Dans tous les cas, cela peut s’avérer difficile à gérer pour ceux qui entourent le vagabond spirituel.

Doit-on tenter de les régir par BBB ?

Comme il s’agit ici d’une nouvelle technologie, l’étiquette et les tendances lourdes n’ont pas encore eu le temps de formaliser une règle acceptée de tous. À l’exception de regards outrés et d’interventions de type : « Bon, là on ferme tous nos BB pour 1 heure ! », les règles à suivre à ce propos demeurent imprécises ou du moins, variables selon les groupes.

À mon avis, le désir individuel de garder le contact avec le monde extérieur à jusqu’ici primé sur le besoin collectif de capturer l’attention de tous durant quelques heures. Rien n’empêche que plusieurs bonnes raisons militent en faveur d’un « BB Black-out » lors de la tenue d’un CA :

• Temps de qualité limité
• Facteur disruptif de la dynamique de groupe
• Générateur potentiel de conflits interpersonnels
• Perte d’attention du concerné sur les sujets discutés
• Absorption inégale par les administrateurs des informations transmises

J’ai pris l’habitude de suggérer à mes collègues des « règles du jeu » qui précisent notamment d’utiliser les technologies de façon à demeurer présent, et ce, sans déranger les autres. Mais est-ce suffisant ? À partir de quand doit-on arrêter une présentation pour s’assurer que tous sont attentifs et à l’écoute du débat en cours ?

Comment sévir lorsque requis sans s’aliéner personne ? Je demeure un partisan de la ligne douce, celle où l’on en parle discrètement après coup avec le « délinquant » pour tenter d’éviter que cela ne se répète. J’imagine que lorsque certains individus dépassent les limites du convenable, une intervention publique du président du conseil pourrait s’avérer nécessaire, mais à quel prix ?

Notre partenaire international (Russie)

Difficile de parler d’un pays ou je ne suis jamais allé et avec lequel je n’ai eu que des interactions au second degré sur certains CA, mais quelques recherches web permettent de dénicher des études sérieuses sur l’état de la gouvernance en Russie et son évolution.

On y constate que l’introduction en 2002 par les autorités des marchés financiers russes(1) d’un code de gouvernance de type volontaire (« comply or explain »), enchâssé dans un cadre législatif s’apparentant parfois à un mode anglo-saxon, mais combiné avec certaines pratiques (celles des « two-tier board ») en usage dans les pays d’Europe continentale, a généré une gouvernance du genre : démocratie dictatoriale. Bien que les lois changent, il ne semble pas en être de même pour ce qui est du comportement des corporations et des hauts dirigeants. La corruption, le manque de transparence et la facilité avec laquelle les entreprises bafouent les droits de leurs actionnaires minoritaires illustrent le climat auquel sont confrontées les sociétés en quête d’une bonne gouvernance.

Un sommaire comparatif de l’état de la gouvernance au sein de divers pays et préparé en 2007(2) relève 3 zones de problèmes qui affligent les administrateurs de sociétés russes qui tentent de remplir leurs rôles :

i. Le manque de transparence (quant à la propriété et la divulgation financière)
ii. La faible application des lois en général et la difficulté de les faire respecter
iii. Le manque de confiance (« trust ») entre les intervenants

Mais de fortes pressions s’exercent pour que ces pratiques changent, notamment des agences de notation internationales qui réclament plus de transparence et les investisseurs institutionnels qui exigent le respect des droits des minoritaires, à défaut de quoi, ils iront investir ailleurs. Le gouvernement quant à lui travaille à réduire le niveau de corruption qui y est systémique.

Un autre type d’éclairage est apporté par un sondage effectué en Russie(3). Questionnés sur les pratiques d’affaires et la culture managériale prévalant au sein des CA en Russie, plusieurs étaient d’avis qu’il y a encore plusieurs failles à améliorer avant d’atteindre ce qui pourrait s’apparenter aux standards de l’ouest (ou nord-américains), notamment :

• L’encadrement légal et les normes comptables moins propices aux sociétés et leurs conseils
• La faible imputabilité des gestionnaires face aux actionnaires
• Une hiérarchie forte et centralisée et la quasi-absence de délégation d’autorité
• La négligence « volontaire » face aux obligations contractuelles
• Le niveau d’agressivité relatif de l’environnement d’affaires russe

Tous semblent également s’entendre pour dire que la récente crise économique a grandement ralenti l’évolution en cours en termes de bonnes pratiques de gouvernance. Ce freinage étant attribué à l’accès réduit aux capitaux étrangers et la conséquente réduction des incitatifs liés à l’adoption de standards internationaux qui l’accompagnait.

Un ami à moi(4) qui y travaille à l’occasion me disait qu’on « reconnait de plus en plus que bonne gouvernance et transparence contribuent à accroître la valeur de l'entreprise, d’où la tendance à recruter des administrateurs indépendants, parfois non-russes, et d'élaborer et communiquer publiquement ses principes de gouvernance. Cependant, on retrouve encore au sein des CA des sous-groupes plutôt hermétiques qui détiennent le vrai pouvoir décisionnaire. Finalement, de pouvoir s'incorporer dans plusieurs juridictions provinciales (« oblasts ») crée des opportunités pour dissimuler les décisions aux actionnaires ».

Les gens d’affaires désireux de profiter de ce vaste nouveau marché devront donc continuer à composer avec une justice à géométrie variable et espérer que les astres se réaligneront bientôt pour relancer la tendance.

(1) : Principles of Corporate Governance, Russia, juin 2010, eStandardsForum.com
(2) : Governance Lexicon, sept 2007, SpencerStuart
(3) : Modern Corporate Governance in Russia as Seen by Businessmen & Experts, sept 2010, National Council on Corporate Governance
(4) : Piers A. Cumberlege, Straightview, Chairman Emeritus “Canada Eurasia Russia Bussiness Association”


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#48 - Bulletin AMBAQ de Septembre-Octobre 2010

vendredi 4 juin 2010

“SPEED DATING” et Gouvernance

Décidemment, on n’arrête pas le progrès. Lorsque j’ai reçu l’invitation de l’Institut des Administrateurs de Sociétés (« IAS ») au printemps dernier pour participer à une activité de réseautage initié par son Président Jean La Couture et réservée aux membres, j’ai eu une petite réaction épidermique, suivie d’un gros oufff…! Du « speed dating » pour administrateurs ? Je n’étais pas vraiment certain qu’ils visaient le bon public, mais une fois l’effet de surprise estompé, je me suis dit, et pourquoi pas !

Formule connue

Soirée conçue de façon informelle, les 80 membres présents étaient conviés, après un cocktail, à prendre place à l’une des tables (huit personnes par table, incluant un animateur) et à échanger à tour de rôle selon le déroulement suivant :
• se présenter, présenter son entreprise et les conseils où on siège
• identifier ses plus grands défis (au travail ou au sein des conseils)
• parler de ses attentes par rapport à l’IAS en termes de nomination à des conseils, de formation, d’appui ou d'autres activités
• le tout en 8 minutes, la gouvernance en version ascenseur allongée

Pour le dessert, tout le monde changeait de table, pour faire un autre tour avec 7 nouveaux visages. On pouvait voir que les gens prenaient un intérêt réel à écouter et comprendre les enjeux et attentes de tout un chacun.

Intérêt d’une telle soirée

Toutes les activités de ce genre ne sont pas équivalentes. Celle-ci m’a donné l’opportunité de mieux connaître une dizaine de personnes (on connaissait tous déjà quelques convives) potentiellement invitées à siéger à mes côtés dans un futur rapproché. Au-delà d’apprendre à connaître les goûts et désirs d’un individu, l’expérience a permis d’associer des expertises et expériences aux profils de compétence de ces administrateurs. On en arrive aussi à juger de la capacité des individus de s’adapter à une situation inusitée et à présenter leur « offre de service » de façon succincte.

Honnêtement, en dehors d’un contexte de head-hunters et avec un tel objectif avoué (connaître et se faire connaître), je n’aurais pas crû la chose possible. Mais comme l’invitation l’avait annoncé : « Ça, c’est du réseautage de qualité ».

Quelques perles

Ci-dessous, d’une perspective d’administrateur et évidemment enrobés de discussions des plus intéressantes, voici quelques-uns des enjeux et défis glanés au cours des discussions entre convives :
• Le rôle d’administrateur au sein d’un CA sous joug familial
• Comprendre la gouvernance des CA transfrontaliers
• Se garder à jour avec les nouvelles exigences réglementaires (IFRS, ACVM, …)
• La gestion des attentes court-terme (et celles démesurées des investisseurs institutionnels en capitaux de risque)
• Mettre en place une bonne gouvernance pour des filiales
• Soulever les vrais enjeux, sans être ostracisé
• Expliquer ce qu’est la bonne gouvernance, et ce que ce n’est pas
• Comment être « relevant » dans mes interactions avec un conseil
• Recruter des administrateurs appropriés aux circonstances (surtout PME)
• Comment expliquer aux « old boys » la valeur de diversifier la composition de leurs conseils d’administration (lire : intégrer des nouveaux, dont moi…)

À refaire ?

Je dis souvent qu’il n’y a pas de mauvais administrateurs, mais seulement des contextes où ils ne devraient pas siéger; il est donc essentiel d’en savoir assez sur eux pour pouvoir procéder aux bons appariements.

À mon avis, une telle rencontre comblait plusieurs de mes besoins organisationnels :
• Identifier des candidats administrateurs (j’ai même pris des pages de notes manuscrites sur plusieurs d’entre eux)
• Connaître leurs compétences et comprendre les contextes où ils seraient à l’aise
• Me faire connaître comme administrateur de société
• Faire connaitre les services offerts par ma firme en gouvernance
• Indiquer à l’IAS ce que j’aimerais qu’elle fasse de plus pour ses membres

Joindre l’utile à l’agréable est toujours intéressant et cette soirée en fut une preuve de plus. Il ne reste qu’à espérer que l’activité soit répétée l’an prochain, et à dire un gros merci à M. Jacques Ménard, président du conseil de BMO Nesbitt Burns et président de BMO Groupe financier qui a gracieusement offert d’héberger l’évènement.


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#47 - Bulletin AMBAQ de Juin-Juillet 2010

samedi 10 avril 2010

Les 7 péchés capitaux

En quête d’un sujet pertinent lors du récent congé Pascal, l’occasion de faire une analogie avec une croyance religieuse était trop forte, je me suis donc demandé : quelles sont les pires fautes que peut commettre un individu siégeant à titre d’administrateur ? Nos administrateurs contemporains sont-ils confrontés aux mêmes tentations que l’homme original ? À voir. Les voici donc en ordre alphabétique :

L’absence


Lorsque l’on recrute un administrateur, un des critères incontournables à valider est la disponibilité. Mais bonne volonté et beaux discours ne sont pas garants de participation. Que l’absence soit physique ou mentale, en vertu de la jurisprudence actuelle, l’administrateur non impliqué commet la pire des fautes : le défaut d’agir. L’erreur est humaine et pardonnable (et c’est bien ainsi), mais de ne pas participer alors qu’on y est tenu (que ce soit en combattant ou en cautionnant), est répréhensible.

L’aveuglement

Quand on ne sait pas où on va, tous les chemins y mènent ! Un manque de vision des administrateurs (et de ses dirigeants) fera en sorte qu’au mieux, l’entreprise stagnera à un certain niveau et au pire, son éparpillement l’amènera à sa perte. L’absence d’autocritique mènera à des décisions non-réfléchies manquant de profondeur et de recul. Le manque de surveillance permettra des comportements répréhensibles qui risquent de venir vous hanter plus tard.

L’incompétence

Évidemment, tout est relatif mais ce comportement est souvent le résultat d’un certain conformisme où certains se réfugient. L’administrateur inefficace, qui ne sait pas trop comment bien appliquer les processus de gouvernance qu’il décide d’utiliser, risque de prendre des décisions mal fondées. L’inefficient choisira les mauvais enjeux ou combats, ou encore, déploiera des processus de régie d’entreprise inappropriés au détriment de ceux qui pourraient contribuer à créer de la valeur. L’incompétent cumulera tous ces défauts et mettra l’organisation en péril. On dit souvent que la compétence coûte cher, mais que l’incompétence coûte encore plus cher.

L’ingérence

Complément direct de la certitude (une attitude à éviter parce qu’elle cause tant d’erreurs), l’ingérence se matérialise sous la forme d’une tendance hypertrophiée à vouloir tout contrôler. Souvent provoquée par une méconnaissance du rôle d’administrateur, le fautif tentera de faire de la sur-analyse et de la « micro-gestion », généralement sans même s’en rendre compte. Habitué à diriger, il se voit aux commandes de l’entreprise, au lieu d’être celui qui supervise le conducteur. Le côtoyer amène les autres à se désintéresser de la situation.

La lâcheté

On décrit souvent le courage managérial comme étant la capacité de faire face à des enjeux qu’il est possible de contourner (et de les laisser aux autres). Le lâche préfère la facilité et le simplisme. Il se plaît à croire que les problèmes seront soit réglés par d’autres ou par le temps, ou encore qu’ils ne sont pas si graves que ça. On retrouve aussi ce péché à l’origine du manque d’éthique organisationnel (cause de situations douteuses) qui, si adressé, obligeraient à modifier les façons de faire inappropriées, mais qu’on justifie en prétextant qu’on est « pas pire que les autres ».

La paresse

Noble descendant des péchés originels, la paresse sur un CA se traduit par un laxisme et une absence de préparation, qui sont rationalisés par le fautif grâce à son intelligence et sa capacité d’analyse rapide. Il suppose qu’il peut généralement tout résoudre instantanément et peut donc faire preuve de passivité jusqu’à ce qu’on l’interpelle directement. Son complément direct est l’indécision (contraire de la certitude tantôt décriée) qui cause la stagnation ou la non-résolution de situations dommageables.

La proximité

Allo les zamis… le copinage (un réflexe naturel chez l’homme de s’appuyer sur ceux qui le supporte) est un comportement nocif sur un CA. Il dénature le rôle de critique normalement assumé par des gens crédibles et indépendants d’esprit. Il en fait des hypocrites qui privilégient le conflit d’intérêts ou des « bénit oui-oui » qui décident tout en fonction de l’intérêt de ceux qu’ils perçoivent comme leurs alliés.

Gagner son ciel

À sa décharge, l’administrateur fautif sur un CA est rarement le seul coupable, il fait partie d’un groupe. Leur performance dépend de l’ensemble des interactions qu’ils ont entre eux et avec la direction. Mais surtout, il faut se rappeler que quelqu’un les a recruté pour y siéger ! Un bon processus de recrutement de vos administrateurs permettrait peut-être d’éradiquer le mal à la racine.

Alors si comme individu vous voulez éviter le purgatoire (ou les amendes de l’AMF), vous avez maintenant une cartographie des pires choses à faire ou laisser faire.

Si au contraire vous ne reconnaissez pas vos comportements dans ces images, vous pouvez soit en déduire que vous êtes sur le chemin du firmament ou peut-être que sans le savoir, vous commettez un (ou plusieurs) des péchés décrits ci-hauts.

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#46 - Bulletin AMBAQ d'Avril-Mai 2010

lundi 22 février 2010

Double discours



La controverse

Suite aux dernières élections municipales à Montréal, Michel Labrecque a été défait à titre de candidat à la mairie du Plateau Mont-Royal (sous la bannière d’Union Montréal). Dans un geste qui en a surpris plusieurs, Gérald Tremblay l’a tout de même reconduit comme Président du conseil d’administration de la STM (une fonction qu’il occupait avant sa défaite), en le nommant à titre de représentant des usagers. Une première, mais une pratique permise par les règlements de l’organisation.

La Presse s’est empressé de souligner que cette nomination occasionnerait des coûts additionnels de 90 000 $ à l’organisme, alors qu’on y prévoit déjà un déficit d’opération avoisinant les 40 millions $.

Les deux partis d’opposition ont quant à eux dénoncé cette « astuce » et ce tour de « passe-passe », en prétendant que les usagers seront mal représentés en nommant à ce poste un non-élu ayant 2 chapeaux incompatibles .

Les bonnes pratiques

Heureusement, on exige de plus en plus de ces sociétés para-municipales (SPM), une gestion de haut niveau et pour ce faire, il est essentiel d’y adopter un maximum de bonnes pratiques de gouvernance.

Une première est de s’assurer que les administrateurs qui supervisent les actions de l’équipe de direction aient les compétences requises et qu’idéalement, ils soient exempts d’agendas politiques trop directifs.

La seconde serait de les rémunérer adéquatement, notamment pour être en mesure de recruter les bonnes personnes (compétences, expériences, expertises) et ensuite pour être en droit d’exiger d’eux de la performance. Avec un budget dépassant le milliard de dollars et plus de 1800 employés, la somme en jeu de 90,000$, même si elle peut sembler importante pour un individu (ou journaliste), n’est pas significative pour l’organisme. Surtout, il ne faut pas perdre de vue qu’il s’agit d’un salaire raisonnable lorsqu’on considère la nature du poste.

Finalement, le niveau d’indépendance à espérer demeure sujet à critique (compte tenu de l’affiliation antérieure de Labrecque avec le parti au pouvoir).

Plus tôt cette année (juillet 2009), le Maire Labeaume de Québec en avait choqué plus d’un en annonçant qu’il tenait à dépolitiser les CA des SPM sous son contrôle, incluant le Réseau de Transport de la Capitale (leur équivalent à la STM) . Appuyé dans cette démarche par Richard Drouin, administrateur émérite, ils ont clairement exprimé qu’ils considéraient les nominations automatiques des élus municipaux sur les CA des SPM comme une pratique du passé à changer.

Il a insisté sur le fait que la majorité des administrateurs de tels organismes se devaient d’être externes et indépendants (bien que prêt à conserver une minorité d’élus sur les instances). Labeaume allait même jusqu’à qualifier de « malsaine » la situation de Labrecque à la STM. Fait cocasse, à l’époque et alors qu’il était nommé d’office, ce dernier défendait (et défend toujours) la nécessité d’avoir une majorité d’élus sur de telles instances, mais, sans pour autant défendre le fait qu’ils devaient tous en être.

Mais maintenant qu’il n’est plus un élu, doit-on ignorer sa candidature ? On peut au moins prétendre que la situation s’améliore par rapport à précédemment.

La bonne personne

Tout d’abord je dois préciser que je considère Michel comme un ami, ayant de plus siégé sur le CA de Vélo Québec, je ne suis pas à l’abri d’un certains biais. Je vais donc tenter de rester neutre en me demandant s’il possède les bons attributs pour le poste ?

Si on remonte dans le temps (mai 2009), alors que Labrecque était en réflexion à savoir s’il allait se représenter comme candidat, on retrouve dans La Presse une journaliste le qualifiant de leader et de candidat d’envergure, avec un plaidoyer militant fortement pour qu’il se présente et demeure en charge du CA de la STM .

Au cours des 20 dernières années où je l’ai côtoyé, j’ai été à même de découvrir des qualités d’idéateur évidentes et de voir évoluer ses attributs de gestionnaire. Depuis toujours, il est lié à des projets et initiatives d’envergure, notamment :



  • Le tour de l’Ile de Montréal

  • Festival de Montréal en lumières

  • Vélo Québec avec sa Route Verte et ses pistes cyclables

Il est un des rares politiciens que je connais qui pratique ce qu’il prêche. Imaginez un peu, il n’a jamais eu de permis de conduire, il n’a donc pas d’auto et se déplace principalement en vélo ou en transport en commun. Auteur du concept de « cocktail transport », il le propose comme une solution pour éviter le déclin du transport collectif dans les villes. Il me semble que ce sont là des attributs plutôt incriminants pour un dirigeant d’une société de transport en commun…

Que faire ?

Nombreux sont ceux qui crient au loup lorsqu’ils perçoivent une situation qui va à l’encontre de leur agenda politique ou simplement de leurs croyances. Trop souvent, cela s’effectue à l’encontre même de l’intérêt de ceux qu’ils prétendent défendre. Pourquoi, si la bonne gestion de nos SPM passe notamment par une bonne régie d’entreprise, n’aurions nous pas les moyens de nous l’offrir.

Pour ma part je suis heureux de la direction qui a été prise dans ce dossier et j’espère que nos gouvernements, de tous les niveaux, poursuivront les démarches entreprises en ce sens ainsi que la tendance lourde qui a été imprimée pour « nos » sociétés parapubliques. Comme j’ai déjà entendu, on a les dirigeants qu’on mérite, et des fois, j’aimerais mériter mieux.



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#45 - Bulletin AMBAQ de Mars-Février 2010