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Président de Lacroix Groupe Conseil à Montréal, une firme qui offre des services de consultation stratégique en gouvernance, l’auteur était jusqu'à tout récemment, Vice-président investissements au Fonds de Solidarité FTQ et Vice-président du chapitre québécois de l’IAS. **** Les chroniques qui apparaissent dans ce blog sont rédigées puis publiées dans le bulletin mensuel de l'Association des MBA du Québec. À noter qu'elles ne reflètent que l'opinion de l’auteur **** Vous pouvez également obtenir plus d'infos sur certains des services en gouvernance que Lacroix Groupe Conseil est en mesure de vous offrir en allant voir le site web à : http://www.lacroixconseil.com

vendredi 24 avril 2009

ET SI C’ÉTAIT FAUX ?


Création versus Évolution

Les célébrations entourant le 200ème anniversaire de naissance de Darwin ont mis en lumière le fait que 40% de la population américaine semble être d’avis que l’Homme et son univers ont été créés de toute pièce il y a quelques six mille ans par un être supérieur. Sous-entendu : la théorie de l’évolution défendue par la communauté scientifique n’est qu’une théorie. Au Canada, cette tendance semble moins prononcée, bien que notre ministre canadien des Sciences et Technologies (Gary Goodyear) ait récemment refusé de confirmer qu’il souscrivait à cette théorie.


C’est quoi le rapport avec la gouvernance ?

Tout comme ces bons américains, plusieurs propriétaires d’entreprises (aussi administrateurs) que je fréquente, sont des créationnistes. Ils semblent croire que la gouvernance a toujours existée au sein de leur organisation. Que la formation, l’évaluation de la performance, l’indépendance, la complémentarité sont des bonnes pratiques qu’ils ont toujours utilisées. Que la formation et le développement des compétences, c’est OK pour les autres, mais eux sont d’avis qu’ils possèdent ce qu’il faut. Il est plus facile de croire à cet état de fait, que d’avoir à se pencher sur comment mieux faire les choses.


L’Homo Gouvernus

Amusé par un commentaire de Charles Sirois lors d’une conférence où il a référé aux administrateurs artisans et aux technocrates, basé sur cette image j’ai revisité l’évolution de l’Homo Gouvernus (sans les dessins de singes usuels) qui grosso modo, passerait par les cinq stades suivants :

Le gestionnaire : Produit de nos collèges et universités, dans la vingtaine, bardé d’au moins un diplôme, il en est à ses premières armes en entreprise. Peu utile sur un CA, on tente souvent par sa présence de combler une lacune de gestion.

L’intrapreneur : Maintenant trentenaire, mariant talents, expérience et connaissances, il s’élève au sein de l’entreprise dans son champs d’expertise et est reconnu par ses collègues. Parfois utile sur un CA (il se distingue par son intensité), sa participation l’aidera à comprendre ce qui préoccupe les patrons de son grand patron.

L’administrateur technocrate : Début quarantaine, il est invité à siéger sur son premier CA d’envergure. Il y apprendra la gouvernance (+/- bien) en fonction de la qualité de ses pairs et du contexte. Malheureusement, trop souvent dans notre écosystème québécois, c’est la règle de « l’aveugle qui mène l’aveugle ». On l’informe sur les bonnes pratiques et il tente de les appliquer. Souvent confiné aux rôles plus accessibles de préservation de valeur et de conformité, il est fort possible qu’il ne progresse plus.

L’administrateur artisan : Fin quarantaine, chanceux d’avoir eu de belles expériences et de bons modèles, il est efficace dans ses pratiques et en mesure de moduler ses actions pour générer une certaine efficience au CA. Il s’informe et se forme, recherche de meilleurs modèles et se distingue de la masse. Il aide l’équipe de direction à mieux performer et créer de la valeur. La poursuite de son évolution est liée à ses qualités intrinsèques.

L’artiste : Souvent âgé, parfois plus jeune, fruit d’attributs innés et acquis, grâce à son image de performant il a bénéficié de tous les « fast-track » offerts et a su les assimiler. Il est de ces individus hors de l’ordinaire, capable d’émettre (ou d’encourager) des idées originales et d’exercer un leadership auprès de gens de haut niveau. Ses conseils valent leur pesant d’or, si utilisés à bon escient.

J’ai sciemment omis le terme Entrepreneur car cet électron-libre est généralement déjà greffé en plus ou moins grande quantité à l’ADN de l’homme d’affaires. On le retrouve fréquemment sur celui des Artistes et, à un moindre degré sur celui de l’Artisan.


J’aurais voulu être un artiste

Mais comment faire pour arriver au stade ultime de l’évolution ? Je pense pouvoir enseigner les bonnes pratiques de gouvernance et faire des Technocrates de mes étudiants (s’ils ont les bons bagages avec eux). Mais pour leur montrer comment devenir un Artisan, j’ai toujours eu de gros doutes et pensé que c’était pas mal plus compliqué.

J’espère par mes actions avoir réussi à me qualifier comme Artisan dans certains contextes favorables (svp, donnez moi le bénéfice du doute…), mais j’ai beau aspirer à m’élever plus haut, le chemin et les moyens restent à trouver. J’ai appris à gérer mes attentes en conséquences.

Lors d’une discussion récente avec la Présidente de l’IAS sur comment créer plus d’Artistes plus vite et « enseigner » le dernier niveau, une image de mentorat m’est venue à l’esprit. Je me suis demandé si des CA réputés, composés de nos artistes de la gouvernance connus et répertoriés, accepteraient d’accueillir en leur sein des administrateurs qui ne serait pas encore rendu à leur niveau, pour contribuer à leur développement ?

Est-ce réaliste de croire que l’on pourrait franchir les obstacles (moins de confidentialité, disponibilité, responsabilité, exclusivité,… plus de générosité, accessibilité, …) qui gênent la mise en place d’une telle initiative ? Pourrait-on stimuler agressivement l’évolution de l’état de la gouvernance et de ses acteurs au Québec ?

Peut-être qu’un programme plus encadré (ou même subventionné) pourrait y arriver, c’est à espérer, mais c’est plus facile de croire qu’on y est déjà.


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#41 -Bulletin AMBAQ d'Avril 2009