La controverse
Suite aux dernières élections municipales à Montréal, Michel Labrecque a été défait à titre de candidat à la mairie du Plateau Mont-Royal (sous la bannière d’Union Montréal). Dans un geste qui en a surpris plusieurs, Gérald Tremblay l’a tout de même reconduit comme Président du conseil d’administration de la STM (une fonction qu’il occupait avant sa défaite), en le nommant à titre de représentant des usagers. Une première, mais une pratique permise par les règlements de l’organisation.
La Presse s’est empressé de souligner que cette nomination occasionnerait des coûts additionnels de 90 000 $ à l’organisme, alors qu’on y prévoit déjà un déficit d’opération avoisinant les 40 millions $.
Les deux partis d’opposition ont quant à eux dénoncé cette « astuce » et ce tour de « passe-passe », en prétendant que les usagers seront mal représentés en nommant à ce poste un non-élu ayant 2 chapeaux incompatibles .
Les bonnes pratiques
Heureusement, on exige de plus en plus de ces sociétés para-municipales (SPM), une gestion de haut niveau et pour ce faire, il est essentiel d’y adopter un maximum de bonnes pratiques de gouvernance.
Une première est de s’assurer que les administrateurs qui supervisent les actions de l’équipe de direction aient les compétences requises et qu’idéalement, ils soient exempts d’agendas politiques trop directifs.
La seconde serait de les rémunérer adéquatement, notamment pour être en mesure de recruter les bonnes personnes (compétences, expériences, expertises) et ensuite pour être en droit d’exiger d’eux de la performance. Avec un budget dépassant le milliard de dollars et plus de 1800 employés, la somme en jeu de 90,000$, même si elle peut sembler importante pour un individu (ou journaliste), n’est pas significative pour l’organisme. Surtout, il ne faut pas perdre de vue qu’il s’agit d’un salaire raisonnable lorsqu’on considère la nature du poste.
Finalement, le niveau d’indépendance à espérer demeure sujet à critique (compte tenu de l’affiliation antérieure de Labrecque avec le parti au pouvoir).
Plus tôt cette année (juillet 2009), le Maire Labeaume de Québec en avait choqué plus d’un en annonçant qu’il tenait à dépolitiser les CA des SPM sous son contrôle, incluant le Réseau de Transport de la Capitale (leur équivalent à la STM) . Appuyé dans cette démarche par Richard Drouin, administrateur émérite, ils ont clairement exprimé qu’ils considéraient les nominations automatiques des élus municipaux sur les CA des SPM comme une pratique du passé à changer.
Il a insisté sur le fait que la majorité des administrateurs de tels organismes se devaient d’être externes et indépendants (bien que prêt à conserver une minorité d’élus sur les instances). Labeaume allait même jusqu’à qualifier de « malsaine » la situation de Labrecque à la STM. Fait cocasse, à l’époque et alors qu’il était nommé d’office, ce dernier défendait (et défend toujours) la nécessité d’avoir une majorité d’élus sur de telles instances, mais, sans pour autant défendre le fait qu’ils devaient tous en être.
Mais maintenant qu’il n’est plus un élu, doit-on ignorer sa candidature ? On peut au moins prétendre que la situation s’améliore par rapport à précédemment.
La bonne personne
Tout d’abord je dois préciser que je considère Michel comme un ami, ayant de plus siégé sur le CA de Vélo Québec, je ne suis pas à l’abri d’un certains biais. Je vais donc tenter de rester neutre en me demandant s’il possède les bons attributs pour le poste ?
Si on remonte dans le temps (mai 2009), alors que Labrecque était en réflexion à savoir s’il allait se représenter comme candidat, on retrouve dans La Presse une journaliste le qualifiant de leader et de candidat d’envergure, avec un plaidoyer militant fortement pour qu’il se présente et demeure en charge du CA de la STM .
Au cours des 20 dernières années où je l’ai côtoyé, j’ai été à même de découvrir des qualités d’idéateur évidentes et de voir évoluer ses attributs de gestionnaire. Depuis toujours, il est lié à des projets et initiatives d’envergure, notamment :
- Le tour de l’Ile de Montréal
- Festival de Montréal en lumières
- Vélo Québec avec sa Route Verte et ses pistes cyclables
Il est un des rares politiciens que je connais qui pratique ce qu’il prêche. Imaginez un peu, il n’a jamais eu de permis de conduire, il n’a donc pas d’auto et se déplace principalement en vélo ou en transport en commun. Auteur du concept de « cocktail transport », il le propose comme une solution pour éviter le déclin du transport collectif dans les villes. Il me semble que ce sont là des attributs plutôt incriminants pour un dirigeant d’une société de transport en commun…
Que faire ?
Nombreux sont ceux qui crient au loup lorsqu’ils perçoivent une situation qui va à l’encontre de leur agenda politique ou simplement de leurs croyances. Trop souvent, cela s’effectue à l’encontre même de l’intérêt de ceux qu’ils prétendent défendre. Pourquoi, si la bonne gestion de nos SPM passe notamment par une bonne régie d’entreprise, n’aurions nous pas les moyens de nous l’offrir.
Pour ma part je suis heureux de la direction qui a été prise dans ce dossier et j’espère que nos gouvernements, de tous les niveaux, poursuivront les démarches entreprises en ce sens ainsi que la tendance lourde qui a été imprimée pour « nos » sociétés parapubliques. Comme j’ai déjà entendu, on a les dirigeants qu’on mérite, et des fois, j’aimerais mériter mieux.
- 30 -
#45 - Bulletin AMBAQ de Mars-Février 2010
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire